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Jean-Luc Marcastel : « J’ai voulu lier La guerre des étoiles et Les trois mousquetaires »

 

Né en 1969, Jean-Luc Marcastel se définit comme un « Alexandre Dumas de l’espace car j’aime autant la verve, les personnages plus grands que nature et l’aventure que l’imaginaire ou la gastronomie ». Auteur de nombreux romans fantastiques ou de fantasy, il a écrit la remarquable trilogie du Simulacre (tome 1, tome 2 et tome 3), qui prolonge l’histoire des Trois mousquetaires dans un univers de science-fiction.

(interview recueillie en octobre 2018)

 

D’où vous est venue cette idée de faire des romans de science-fiction à la sauce mousquetaire ?

Je ne sais pas trop. Ca m’est venu d’un coup : j’ai vu cette première scène avec d’Artagnan muni d’une épée énergétique sur un galion volant au-dessus de la Terre poursuivi par des automates… Je crois que j’ai voulu lier deux des choses qui m’avaient beaucoup plu dans ma jeunesse : Les trois mousquetaires et La guerre des étoiles. Il y a des romans qui viennent par une idée, celle d’un personnage par exemple. Là, ce roman est venu par une scène, la scène de départ. A partir de là, j’ai tiré le fil et le livre a suivi derrière, avec toute cette histoire de mémoire envolée, le fait que ce jeune d’Artagnan doit retrouver la mémoire de l’original, etc. Ca m’a beaucoup amusé. Ce premier volume, je l’ai écrit en un mois, vraiment d’une traite ! Ca fait partie des romans que j’ai écrits le plus rapidement.

Aviez-vous dès le début cette idée que le d’Artagnan qui apparaît dans cette scène initiale n’est pas le vrai d’Artagnan mais une reproduction?

Oui tout à fait, l’idée du Simulacre est sortie de la même façon, cette idée d’un clone qui n’a pas toute sa mémoire… Il me fallait dans le livre un Candide, qui nous permette de découvrir cet univers par les yeux de quelqu’un qui ne le connaît pas. Ca permet de montrer les différences entre notre univers et le sien. D’où l’idée de quelqu’un qui n’a pas de mémoire. Et pourquoi n’a-t-il pas de mémoire ? Parce que c’est un clone et que l’on n’a pas mis sa mémoire à jour. Je trouvais intéressante l’idée d’un personnage qui court après sa mémoire. Ensuite, tout le reste en découle. L’idée de Richelieu en « mécanomate », transformé en une espèce de robot, vient de son image dans une armure au siège de La Rochelle.

Vu la vitesse à laquelle vous avez écrit votre roman, je suppose que vous n’avez pas relu Les trois mousquetaires méticuleusement avant de vous lancer ?

En fait j’avais relu le livre pas très longtemps avant et en plus mon fils l’avait acheté en livre audio et l’écoutait en boucle.

Votre livre fourmille d’allusions à des scènes précises des Trois mousquetaires, ce sont des choses qui vous aviez en mémoire, donc ?

Oui, tout à fait, ça et aussi le ton de Dumas. C’était très important pour moi de retrouver son ton, cette espèce de faconde, d’humour aussi, ce savant dosage entre rire et passages plus sérieux voire même dramatiques. Et aussi bien sûr ces aventures incessantes qui caractérisent Les trois mousquetaires y compris par rapport au reste de son œuvre. Je crois que ce n’est pas un hasard si ce livre là est le plus connu de Dumas dans le monde entier. Il y a cette notion d’amitié indéfectible dans le premier volume de la série des Mousquetaires, que l’on ne retrouve pas de la même façon dans Vingt ans après et dans Le vicomte de Bragelonne, puisqu’il y a quelque chose de cassé, une désillusion… Ca fait que les gens les connaissent moins, même si Bragelonne, c’est extraordinaire. Quand je fais mourir le « vrai » d’Artagnan dans mon premier tome, je lui fais dire les mots qu’il a à la fin du Vicomte de Bragelonne : « Athos, Porthos, au revoir ! Aramis, à jamais adieu ! ». Donc on sait qu’Aramis est celui qui a trahi puisque c’est le seul qui survit à la fin de Bragelonne, c’est la victoire des hommes de robe sur les hommes d’épée… Je voulais retrouver ça dans l’histoire : l’homme de compromis qui devient l’homme de l’ombre et qui se retourne contre ses amis.

En fait, vous faites basculer Aramis totalement du côté obscur, au point qu’il trahit l’humanité toute entière !

Tout à fait ! Dans ma version, Richelieu est bien plus sympathique que lui ! Tout ce qu’il fait, c’est pour le Royaume.

Effectivement, dans votre roman, Richelieu apparaît d’abord comme terrifiant et inhumain, mais il se révèle finalement comme un défenseur de l’humanité alors qu’Aramis fait l’inverse.

En effet, je me suis amusé à renverser les valeurs. Même si dans Dumas Richelieu n’est jamais vraiment mauvais, il obéit toujours à la raison d’Etat, contrairement aux films où on en fait toujours le grand méchant. Aramis, je le noircis énormément. Pour moi, c’est celui qui trahit, c’est l’homme de robe qui va vendre son âme pour l’immortalité alors que les autres mousquetaires sont les derniers chevaliers. J’ai forcé ce trait là dans mon histoire. Ces idées sont déjà dans Dumas, je les ai poussées à l’extrême.

Vous jouez beaucoup avec les personnages de Dumas. A la fin de votre série, il y a cette espèce de « redécouverte » surprenante entre Athos et Milady…

J’ai toujours eu un certain attachement pour le personnage de Milady qui est tout de même très maltraitée chez Dumas… On en arrive presque à la comprendre. Son mari découvre qu’elle est voleuse, il la pend à un arbre ! C’est quand même un peu extrême ! Dumas ne la ménage pas : d’Artagnan la viole en se faisant passer pour un autre homme, elle est exécutée à la fin des Trois mousquetaires… J’ai donc essayé de la réhabiliter un peu. C’est un personnage extraordinaire qui a fasciné des générations d’auteurs et de réalisateurs. Mais c’est bien le propre de Dumas de créer des personnages plus grands que nature.

Que représente Dumas pour vous ? Depuis quand le lisez-vous ?

J’ai dû tomber dedans quand j’avais douze ou treize ans. J’ai commencé par la science-fiction, je suis de la génération Guerre des étoiles. Mais mon père avait une énorme bibliothèque avec tous les Dumas, il m’en a mis dans les mains. C’est tellement bien écrit, avec des rebondissements à chaque page, des personnages extraordinaires, ça n’arrête pas de bouger. Encore aujourd’hui, quand de jeunes auteurs me demandent des conseils, je leur dis : « lisez Dumas, lisez Dumas ! » Il avait tout compris : comment raconter une histoire, comment lier des scènes entre elles. Regardez les grands feuilletons télévisés qui déchainent les passions actuellement : ils doivent énormément à Dumas et à toute cette littérature de feuilletons.

Continuez-vous à lire Dumas ?

A le lire et à le relire ! Bien sûr, et très régulièrement. Soit en lisant un livre entier, soit en relisant juste un passage pour le plaisir, pour  le plaisir de la langue, c’est gouleyant. Dumas, je le lis à haute voix !

Vos livres préférés de lui ?

La trilogie des Trois mousquetaires, toute la série de La reine Margot et des Valois. Le comte de Monte-Cristo, une livre fabuleux et terrible.

Y a-t-il d’autres livres dans votre œuvre qui aient un lien très direct avec Dumas ?

Non, Le Simulacre est le seul. Par contre, Dumas a influencé  mon écriture et ma façon de penser les récits. Et il n’est pas exclu qu’à l’avenir je puisse retomber chez lui en m’inspirant d’une de ses œuvres pour en écrire un nouveau prolongement. Monte-Cristo, par exemple, il y a quelque chose à faire avec ça, c’est un personnage fascinant… Dans Monte-Cristo et dans les Mousquetaires, il y a quelque chose d’intemporel, d’universel, c’est ça qui chez Dumas est assez extraordinaire.

Comme on peut le voir sur pastichesdumas, il y a de très nombreux romans de science-fiction qui s’inspirent des Mousquetaires ou de Monte-Cristo. N’est-il pas un peu paradoxal qu’un auteur de romans historiques soit une source d’inspiration pour des écrivains qui se projettent dans le futur ?

Comme je le disais, les thèmes de Dumas sont universels. Même George Lucas s’est inspiré des Mousquetaires. Le traitement très « cape et épées » de La guerre des étoiles, les Jedi sont un peu des mousquetaires, finalement… Ce que j’ai fait, c’est un juste retour des choses : en m’inspirant de La guerre des étoiles et en l’incluant dans les Trois mousquetaires, j’ai bouclé la boucle !

Propos recueillis par Patrick de Jacquelot

 

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