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The lord of the sea

Matthew Phipps Shiel

320 pages
1901 - Royaume-Uni
SF, Fantasy - Roman

Intérêt: *




Très inspiré par Le comte de Monte-Cristo, ce roman britannique datant de la première année du XXème siècle combine différents éléments inhabituels: certains intéressants, comme une dimension de texte précurseur de la science-fiction; d’autres franchement déplaisants, comme un antisémitisme violent.

L’histoire est celle d’un jeune Anglais, Richard Hogarth. D’origine modeste, c’est un idéaliste qui se préoccupe du bien-être de l’humanité. Il ignore – mais le lecteur le sait – que son origine familiale n’est pas ce qu’il croit: il descend en fait de parents juifs.

Or, il se trouve que Richard entre en conflit violent avec le propriétaire des lieux qu’il habite avec son père: Baruch Frankl, un Juif décrit comme dans les pires caricatures antisémites de l’époque, fourbe, cruel, avide, etc… La situation est d’autant plus compliquée que Richard est amoureux de Rebekah, la sœur de Frankl (le lecteur comprend facilement que c’est bien naturel, puisque Richard est un Juif qui s’ignore…), et que Frankl convoite lui-même Margaret, la sœur de Richard.

L’infâme Frankl décide de perdre Richard: il organise la disparition de ses petites économies, et le fait accuser d’un meurtre qu’il n’a pas commis. Richard est emprisonné dans un pénitencier. Durant sa détention, il est frappé d’une illumination: la source de tous les malheurs des hommes vient de la propriété privée de la terre. Si les loyers dus pour les terres agricoles et les logements étaient payés à la collectivité, la prospérité et le bonheur de tous s’imposeraient (!).

Il décide dès lors de s’évader pour faire profiter le monde de sa découverte… Une évasion très compliquée lui permet de recouvrer la liberté. Mais il constate que le monde n’est pas prêt à accepter spontanément ses idées: il lui faudra faire preuve de persuasion.

Richard entre en possession d’une fabuleuse fortune: une météorite chargée de diamants, opportunément tombée du ciel. Armé de ce capital, il apparaît au grand jour, méconnaissable, sous l’apparence d’un richissime homme d’affaires, Mr. Beech. Son sens inné de l’argent (une fois de plus, le lecteur est amené à constater que Richard est bien juif…) lui permet de multiplier encore ses moyens financiers (voir extrait ci-dessous).

Pour acquérir la puissance dont il a besoin, Richard décide d’utiliser un corollaire de sa théorie sur la propriété de la terre: il va prendre possession de ce que personne n’avait revendiqué à ce jour: la mer! A cette fin, il fait construire des dizaines d’îles artificielles, gigantesques «araignées» blindées, bardées de canons et habitées par son armée privés. Disposées à des emplacements stratégiques sur toutes les routes maritimes du globe, ces îles prélèvent un «loyer» sur les navires de passage. Les expéditions navales montées par les grandes puissances échouent face aux redoutables engins de Richard. Sa richesse et sa puissance deviennent fabuleuses: il est le roi de la mer.

Il en profite alors pour chercher à faire interdire la propriété privée de la terre dans tous les pays. L’Angleterre, qui a perdu sa suprématie maritime et craint la ruine, choisit de se rallier au nouveau maître: elle lui offre la régence du pays. Richard se retrouve donc simultanément roi de la mer et souverain en exercice de l’Angleterre.

Il cherche donc à y faire voter sa loi fétiche sur la propriété. Mais cela ne va pas tout seul, et le projet semble condamné au rejet par le Parlement quand le groupe des députés juifs décide de voter contre.

Richard est alors saisi d’une illumination – encore une: il lui faut expulser les Juifs du pays. Tous, hommes, femmes, enfants, sont convoyés manu militari en Palestine. Au faîte de son pouvoir, Richard est alors trahi: une coalition d’hommes d’affaires, dont, évidemment, l’infâme Frankl, s’allie à l’un de ses proches, O’Hara, un prêtre criminel avec qui il s’est lié au bagne et qui l’a accompagné – et instruit – depuis son évasion (clin d’œil à un abbé Faria qui deviendrait le traître de Monte-Cristo).

Les îles artificielles tombent aux mains de ses ennemis, son passé de bagnard est révélé et il est poignardé. En fuite, Richard apprend enfin ses véritables origines: il va donc rejoindre son peuple dans l’exil qu’il lui a lui-même imposé. Il est accueilli en Messie, prend la tête des Juifs, épouse Rebekah et passe de longues années à bâtir la prospérité de son peuple…


Touffu, souvent difficile à lire, The lord of the sea n’est pas dépourvu de tout mérite. Ses quelques éléments de science-fiction vieillotte sont intéressants. Sa version d’un comte de Monte-Cristo qui se fixe comme objectif le bonheur de l’humanité toute entière, quitte à employer la force pour y arriver, est originale.

Mais le livre souffre de graves défauts. Non seulement, bien sûr, pour tout ce qui concerne les fantasmes de Shiel à propos du peuple juif (voir la notice sur l'auteur): les thèmes abordés et le ton employés étaient sans doute courants en 1900, ils ne sont plus tolérables aujourd’hui. Et en plus, le livre est souvent totalement délirant: qu’il s’agisse des théories socio-économiques de Richard (outrageusement simplifiées dans ce résumé) ou des envolées mystiques de la fin, la lecture de bien des pages laisse un malaise certain.


Extrait du chapitre 30 Mr. Beech

During six weeks Hogarth lived that life of daily passage between Keppel Street and his office, unknown to the general world, but spreading a noise of rumour through certain circles of the business world. All day in the den the gas-jets brawled upon him, he not for minutes casting a glance, if a clerk brought a caller's name. And here was no novice modesty in the tackling of affairs; as O'Hara, who would be there, said: "You must have been born in the City; you have the airs, the very tricks, of Threadneedle Street, you - Jew". In a day the prelate counted seven hundred and thirteen telegrams from the Terni Cannon foundry, many a diamond dealer, polisher, cutter, the Vulcan Shipyard of Stettin, the Clydebank, Cramp of Philadelphia, the Russian Finance Minister, San Francisco, Lloyd's, metal brokers, the Neva, and one night, the eve of a dash to Amsterdam, he, with O'Hara, Loveday, and five clerks, sat swotting till morning broke, sustained by gin and soda-water. The priest lived with wide eyes at the easy fleetness with which Hogarth rolled off him the greatest affairs: as when on the day after his return from Holland he stood, his thumbs in his waistcoat armholes, with quite the right air of serene City-king, his tallness possessing considerable natural courtliness, and the De Beers' Secretary sat before him, saying, "Well, Mr. Beech, I have spent the morning with your brokers, and have felt that I must see you personally before calling a meeting. This proposition is so tremendous—"

"I only wish I had some time", said Hogarth, "I would invite you to dine upon the matter; but it is really so simple - everything at bottom is merely twice two are four. And you are not obliged to turn over Kimberley to me: only, in that case, as I have said, I shall be compelled to flood the market with diamonds as cheap as cat's-eyes—"

When De Beers stared, Hogarth shrugged, saying: "I suppose I must convince you—" and, unlocking a safe, he took out an écrin which contained three stones. De Beers appeared to see Titania peering in their fairy painting.

"Of stones of this water and carating", said Hogarth, "we have two hundred and eleven in the Bank of England, two hundred and thirty-eight in other English and Continental banks, and seventy-five in safe-deposit. The carating of these three is 111 1/2; and in the sixties, such as this one" - he took a stone from among coppers in his pocket - "we have three hundred odd on hand, all flawless, and an equal number cutting. When I point out, what you know, that our mine is as yet without the delicate plant of Kimberley, the stones being simply picked from the blue-earth by three inexpert friends of the firm on the spot, you will recognize that the wealth of a mine can no further go.…"

He was rid of the visitor within six minutes, and within three weeks, by knack and organization, had gathered into his hands most of the reins necessary to the control of the world's trade in diamonds.


 

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