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Sleepers
A true story

Lorenzo Carcaterra

374 pages
1995 - États-Unis
Roman

Intérêt: **

 

Note: ce livre est classé à la fois dans la catégorie "suite des Trois mousquetaires" et dans celle "suite de Monte-Cristo". Sa fiche peut donc apparaître deux fois dans les listes de recherche.


Voici un livre qui défie les catégorisations. On ne sait pas trop s’il s’agit d’une histoire vraie ou d’un roman, ni s’il rend davantage hommage au Comte de Monte-Cristo ou aux Trois mousquetaires. Mais ce qui est sûr, c’est que le récit est remarquable et mérite le détour.

Sleepersest présenté par son auteur comme un récit autobiographique, retraçant ce qui est véritablement arrivé à lui et à ses amis. Mais Carcaterra explique au début du livre qu’il a procédé à de nombreux changements (noms, lieux, etc…) dans la «re-création» de ces événements. Et le livre est écrit sous une forme résolument romanesque.

L’histoire est celle de quatre amis, quatre enfants vivant dans les années 1960 dans un quartier déshérité de New York. Les premiers chapitres retracent de très belle façon leur vie dans un milieu affecté par la misère, où la violence et le crime ne sont jamais loin, mais où une vraie solidarité permet de faire front.

Les quatre amis, inséparables, ont notamment une passion commune pour les récits d’aventures, qu’il s’agisse de romans, de comics ou de films. Ils aiment particulièrement le Comte de Monte-Cristo et Les trois mousquetaires. Ils se comparent d’ailleurs tout naturellement aux quatre héros de ce dernier livre.

Agés d’une douzaine d’années en 1967, les quatre garçons ne sont pas des petits saints – comment le pourraient-ils dans le milieu où ils vivent? – mais leur petite délinquance se combine avec une sorte d’innocence et une absence totale de vraie méchanceté.

Leur vie bascule quand, en tentant d’échapper à un vendeur de hot-dogs qu’ils n’ont pas payé, ils blessent très sérieusement un vieil homme qui passait par là. Arrêtés, ils sont condamnés à un an de maison de correction.

Leur arrivée dans celle-ci est une plongée dans l’horreur à laquelle rien ne les avait préparés. Non pas, comme dans tant de récits d’emprisonnements, du fait des autres détenus. Mais parce que les gardiens du camp exercent un pouvoir illimité et s’emploient à martyriser leurs jeunes prisonniers. A peine plus âgés qu’eux, ils ne leur épargnent rien: extrême violence, humiliations incessantes, arbitraire total, viols… La cruauté des quatre gardiens qui se sont «attachés» aux quatre enfants ne connaît aucune limite et va parfois jusqu’au meurtre.

Confrontés à une telle entreprise de destruction de leur personnalité, les quatre enfants sortent de là marqués à vie. Deux d’entre eux, John et Tommy, basculent dans le crime et deviennent trafiquants de drogue et tueurs. Le troisième, Michael (assez clairement l’«Athos» du groupe), fait des études de droit et devient magistrat. Le narrateur, enfin (équivalent de d’Artagnan), entre dans un journal.

Dix ans plus tard, les deux tueurs tombent par hasard sur un de leurs tortionnaires de jadis et l’assassinent en public. Ils sont arrêtés et vont passer en jugement; leur condamnation ne fait aucun doute.

Mais Michael élabore un machiavélique projet consistant à faire acquitter ses deux amis et à se venger simultanément des trois autres gardiens. Dissimulant les liens qui l’unissent aux deux prévenus, il se fait nommer procureur à leur procès. Là, il organise sa propre défaite, en s’entendant secrètement avec l’avocat de la défense et en montant un faux témoignage - celui du curé de la paroisse! - favorable aux deux tueurs (voir extrait ci-dessous).

Simultanément, avec l’aide de Lorenzo le narrateur, il s’occupe des trois gardiens survivants. L’un d’eux est devenu policier et il découvre qu’il est profondément corrompu. Il le livre à la police des polices et le fait ainsi emprisonner pour longtemps.

Le deuxième est devenu fonctionnaire à la municipalité de New York. Sa passion pour les jeunes garçons, qui ne l’a pas quitté depuis la maison de correction, l’a amené à s’endetter auprès de prêteurs sur gages. Michael fait racheter ses dettes et les livre à un truand dont le gardien a tué le jeune frère: le truand se venge de façon sanglante.

Le troisième gardien, enfin, est devenu un homme plus ou moins respectable. Michael le fait venir au procès comme témoin de moralité du gardien assassiné. Mais il s’arrange pour que l’audience révèle toutes les horreurs qui se déroulaient dans le camp disciplinaire où les deux hommes étaient gardiens dans leur jeunesse. La vie du témoin s’en trouve brisée. Et finalement, le procès s’achève sur l’acquittement des deux tueurs. Michael abandonne la magistrature.


Très éloigné, bien sûr, des deux grand romans de Dumas, Sleepers n’en constitue pas moins un très bel hommage à ceux-ci. Les quatre enfants ont été bercés par l’histoire des mousquetaires et leur amitié, plus forte que les pires épreuves et qui résiste aux profondes différences dans leurs parcours respectifs, en est un écho direct.

En ce qui concerne Monte-Cristo, les références sont constantes: dans les lectures d’enfance, dans la maison de correction, pendant le procès… Le livre de Dumas est pour eux successivement source de rêve, d’encouragement dans les épreuves, d’inspiration dans la vengeance.

Même si l’évolution des victimes n’a rien à voir avec celle d’Edmond Dantès (il n’y a ni surhomme, ni fortune, même s’il y a profonde transformation), les modalités de la vengeance renvoient directement au roman de Dumas. Sauf pour le premier gardien assassiné, elle s’exerce de façon détournée en utilisant les crimes et les faiblesses des tortionnaires.

Ajoutons à cela que le livre est extrêmement bien écrit et souvent très émouvant. Vivement recommandé!


Extrait du Livre 3, chapitre 17

'Do you know the two defendants, John Reilly and Thomas Marcano?'

'Yes I do,' Father Bobby said.

'How long have you known them?'

'Since they were boys,' Father Bobby said. 'They were students of mine.'

'How would you describe your relationship with them today?'

'We try to stay in touch,' Father Bobby said. 'I try to do that with all my boys.'

'And how do you do that?'

'Through sports, mostly,' Father Bobby said. 'We either organize a game or go to one. It's a common ground. Makes it easier to get together.'

'Father, do you recall where you were on the night of November first of this past year?'

'Yes I do,' Father Bobby said.

'And where was that?'

'I was at a basketball game,' Father Bobby said. 'At the Garden. The Knicks against the Celtics.'

'What time does a Knick game begin?'

'They usually start at about 7:30,' Father Bobby said.

'And at what time do they end?'

'Between nine-thirty and ten,' Father Bobby said. 'Providing there's no overtime.'

'Was there any that night?'

'No, there wasn't,' Father Bobby said.

'And who won the game. Father?'

'Sad to say, it was the Celtics,' Father Bobby said. 'Kevin McHale and Robert Parish were a little too much for our guys that night.'

'Were you at the game alone?'

'No,' Father Bobby said. 'I went there with two friends.'

'And who were those two friends. Father?'

'John Reilly and Thomas Marcano,' Father Bobby said.

'The two defendants?'

'Yes,' Father Bobby said, gesturing toward John and Tommy. 'The two defendants.'

The spectators sitting behind the wooden barrier gave a collective cry. Carol put her head down, her hands covering her mouth, her shoulders shaking. Michael took a deep breath and looked toward the ceiling.

John and Tommy turned around, scanning the spectators, their bodies relaxing. As they turned to face the bench, they looked over at me. I smiled as they looked down at the cover of the book in my hands.

John had tears in his eyes.

I was holding a copy of The Count of Monte Cristo.


 

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