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Milady, comtesse de La Fère

Christiane Blanc

280 pages
Coëtquen Editions - 2013 - France
Roman

Intérêt: **

 

 

Voici un cas tout à fait unique parmi les nombreuses œuvres passées en revue sur ce site: ce roman est en quelque sorte issu de pastichesdumas.com! Christiane Blanc fait en effet partie des auteurs qui ont envoyé des textes à publier dans notre rubrique Votre pastiche. Son premier texte, de la longueur d’une nouvelle, a été suivi d’un deuxième, puis d’un troisième… Au fil du temps, il est devenu clair, avec vingt-deux chapitres publiés sur ce site, qu’il y avait là le – gros – début d’un roman. Et de fait, le livre publié en 2013 reprend les textes parus initialement sur pastichesdumas en les réécrivant et surtout en allongeant le récit de façon à obtenir une histoire complète.

Ce Milady, comtesse de La Fère suit la vie de la future Milady depuis son séjour au couvent, jeune fille, jusqu’à sa pendaison par son mari, le comte de La Fère, qui deviendra Athos. Pas de fortes déviations ou d’ajouts surprenants à la trame donnée dans Les trois mousquetaires. Le propos de Christiane Blanc est de montrer comment une jeune fille ordinaire, que rien ne prédisposait à devenir la tueuse sanguinaire de Dumas, a connu cette transformation. Avec un élément déclencheur qui fait basculer sa vie: la décision de son frère de l’obliger à prendre le voile. Un sort qui répugne totalement à cette adolescente romantique, prête à tout pour y échapper.

Christiane Blanc n’est pas la première à se livrer à une réhabilitation de Milady. Yak Rivais a fait de même avec son roman Milady mon amour et Agnès Maupré avec sa bande dessinée Milady de Winter. Autant de façon de montrer que la «méchante» absolue des Trois mousquetaires avait peut-être quelques circonstances atténuantes…

Extrait du chapitre 26

- C’est assez ! intima le bourreau. Amenez-la devant le tabouret !

Insensibles à ses appels, ils la traînèrent non sans peine, jusqu’à l’endroit désigné.

Car malgré leur brutalité, elle se débattait comme un diable, presque torse nu dans l’effort, les cheveux défaits, répandus dans son dos. Avec l’énergie du désespoir, elle trouva la force de donner un coup de pied dans la cheville de l’un d’eux qui en poussa un cri de douleur, sans lâcher sa prise. Alors, s’appuyant de tout son poids sur leurs bras, elle lança ses jambes en avant.

- Lâchez-moi ! Au secours ! cria-t-elle en renversant le tabouret.

Le brasero ensuite ? espéra-t-elle. Si seulement elle pouvait répandre les braises au sol..., la seille aussi... Éteindre les braises avec l’eau du baquet... !

Le bourreau avait remis l’objet sur ses pieds.

- Mademoiselle, je pourrais être plus sévère ! dit-il d’un ton neutre, en la voyant préparer un autre coup de pied. Savez-vous comment j’obtiens l’obéissance de mes suspects ?

Elle fit non de la tête, la bouche sèche.

- Je les déshabille entièrement... Ce n’est pas ce que vous voulez, n’est-ce pas ?

La mâchoire pétrifiée par la menace, elle avala sa salive dans un hoquet d’horreur, réitéra de la tête son geste de dénégation.

- Alors, laissez-vous faire... d’ailleurs ce sera moins douloureux...

Charlotte se laissa mettre à genoux.

- Monsieur, ayez pitié ! supplia-t-elle sans plus de fierté pour retenir ses larmes. Je vous promets de soigner votre frère... de rester près de lui... Ayez pitié, je n’ai que quatorze ans...

C’est alors qu’une aide brève, mais inattendue, raviva encore une lueur d’espoir. L’homme qui avait déjà tenté de la défendre, osa à nouveau fléchir le bourreau.

- Elle n’a que quatorze ans, murmura-t-il.

- C’est assez !

Le ton de la réplique gifla ce dernier instant d’espoir, entraînant les deux hommes à poursuivre leur abjecte besogne. Ils plaquèrent le buste de la jeune fille sur le dessus du tabouret. Charles Sanson, pour sa part, regroupa sa chevelure sur un côté de son cou. Sa mission commençait.

Sourd, muet, aveugle à cette jeunesse qu’il s’apprêtait à briser, Charles Sanson, bourreau de Lille, se dirigea d’un pas égal vers le brasero, saisit le fer brûlant et le trempa dans le baquet.

Il daigna à peine un regard sur Charlotte. Au contraire, le menton légèrement levé, il projeta un regard froid sur le mur. Quand il baissa les yeux sur la jeune fille en larmes, un rictus de haine et de mépris lui étirait les lèvres.

- Maman !

Nul ne s’attendait à cet appel jailli du fond de l’être. Charlotte l’avait hurlé. S’il avait jailli plus tôt, peut-être serait-il parvenu à ébranler pour de bon le cœur de ces trois hommes... De deux ? Seulement d’un seul ? Qui aurait pu porter ce secours tant espéré... Mais elle n’avait crié qu’à la dernière seconde, juste avant que le fer ne touche la peau. Dans un dernier soubresaut vers l’avant, elle avait réussi à décaler son buste. Cet appel déchirant fut son dernier mot. Puis elle s’évanouit.

 


 

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