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R.A. Steffan : « Il fallait que je crée mon propre monde pour les Mousquetaires »

 

L’Américaine R.A. Steffan a écrit la série The Queen’s Musketeers qui comprend quatre parties : un long roman qui s’étend sur les Livres 1, 2 et 3, puis un deuxième roman qui en constitue le Livre 4. Elle explique dans cette interview comment elle en est venue à écrire ces récits et pourquoi elle les a situés dans une Histoire parallèle. Voir la version originale en anglais – original version in English et le site de l'auteure.
(interview recueillie en février 2017)

Pourquoi avez-vous décidé d’écrire des romans basés sur les histoires de mousquetaires de Dumas?

J’étais un écrivain de fan fiction bien avant de devenir professionnelle et je suis tombée amoureuse presque immédiatement du feuilleton Musketeers de la BBC*. Il n’a pas fallu longtemps avant que j’aie envie d’écrire des histoires pour cette série. Pour une raison quelconque, il se trouve que le fan club de ce feuilleton bénéficie d’auteurs vraiment excellents et se révèle très animé. J’y ai été très active**.

J’ai réalisé un jour que le travail de Dumas était dans le domaine public. Tant que je faisais attention à faire des choses différentes de la version de la BBC, rien ne m’empêchait de publier professionnellement mes propres histoires des Mousquetaires. Et c’est ce que j’ai fait !

A partir de là, je me suis mis à publier d’autres œuvres complètement originales, mais les mousquetaires de Dumas ont été les déclencheurs, qui m’ont permis de passer de l’écriture de fan fiction à celle d’œuvres originales.

Vos histoires de mousquetaires sont donc en fait inspirées par le feuilleton de la BBC et non par les romans de Dumas ? Avez-vous lu ces derniers par la suite ?

Comme la plupart des enfants américains, j’ai lu Les trois mousquetaires quand j’étais enfant, et je les ai relus à l’université pour mon plaisir. J’ai aussi vu les films d’Hollywood des années 1970 (ma mère les adorait) et deux ou trois autres adaptations. Malgré cela, je ne me suis jamais vraiment passionnée pour les mousquetaires avant le feuilleton de la BBC. Et c’est bien son ton plus sombre qui m’a inspiré The Queen’s Musketeers. Parce que, pourquoi rendre les choses un petit peu noires quand on peut les faire plutôt VRAIMENT noires ?

Comment vous est venue l’idée de situer vos histoires de mousquetaires dans une Histoire parallèle ?

La réponse découle de la première question. Je voulais conserver le côté réaliste, conforme à la vraie vie, de la BBC, qui est tellement différent d’autres adaptations beaucoup plus légères. Il était cependant très important de ne pas enfreindre le copyright de la BBC en utilisant certains de ses éléments originaux comme l’idée de Milady ayant tué le frère d’Athos ou celle de Porthos ayant grandi en tant qu’orphelin dans la Cour des Miracles, etc.

Il fallait que je crée mon propre monde pour les Mousquetaires. J’ai donc fait la liste de tout ce que je voulais y voir. Je voulais qu’Athos et Milady soient ensemble. Je voulais que d’Artagnan soit démoralisé, en détresse psychologique et ayant désespérément besoin d’une « famille ». Je voulais qu’il ait une histoire d’amour-toujours avec Constance. Je voulais qu’il y ait une quête pour sauver la France d’un sort terrible.

J’ai donc commencé à faire des recherches sur l’histoire du 17ème siècle. Qu’est-ce qui pouvait plonger l’Europe dans un chaos tel que la Reine et ses gardes en seraient réduits à être des fugitifs sans amis ? Qu’est-ce qui pouvait détruire l’économie et briser les familles ? Eh bien, il y avait eu une résurgence de la Peste noire au début des années 1600. Elle était restée confinée à l’Espagne et à l’Italie et elle avait disparu assez rapidement. Mais que se serait-il passé si la maladie avait subi une petite mutation qui l’avait rendue plus mortelle et s’était déplacée un peu vers le reste de l’Europe ?

Des destructions. Le désespoir. Le quasi effondrement de la civilisation.

Dès l’instant où j’avais ce catalyseur, il n’y avait plus qu’à suivre le fil de « ce qui aurait pu se passer ». La reine Anne a fait une seconde fausse couche en 1631 après une chute de cheval. Que se serait-il passé si ça n’avait pas été le cas ? Et si Louis XIII mourrait de la peste pendant son exil ? Et si Isabelle de Savoie était devenue veuve et avait épousé le duc d’Orléans et lui avait donné un héritier ? Avec son incroyable talent d’adaptation à différents régimes, quel côté le cardinal de Richelieu aurait-il soutenu publiquement ?

C’est comme cela qu’est né The Queen’s Musketeers. Ca reste de loin l’œuvre pour laquelle j’ai fait le plus de recherches, et ce fut épuisant à écrire. Cela dit, je suis fière du résultat, même si elle n’a pas rencontré de succès commercial ou financier. Cela m’a appris que je pouvais écrire des histoires de la longueur d’un roman, que je pouvais faire des livres constituant une série et que des gens étaient prêts à payer pour ce que j’avais écrit (même si pas en aussi grand nombre que j’aurais aimé).

Pour toutes ces raisons, même si je n’en vends pas un seul exemplaire supplémentaire, cela a bien valu le temps et les efforts que j’y ai consacrés.

Pourquoi avez-vous si peu utilisé dans le Livre 4 cet univers que vous avez créé ?

Pour moi, en fait, ce cadre d’une Europe ravagée par la peste sous-tend dans une très large mesure le monde décrit dans le Livre 4. La Peste noire se résorbe toujours d’elle-même après quelques années, ça n’est pas une maladie qui peut perdurer pendant dix ans. Mais la société s’en trouve changée. D’un seul coup, de simples plébéiens osent gagner de l’argent et devenir plus riches que la noblesse. Une partie de la population se tourne vers la religion et une morale stricte pour surmonter le choc traumatique causé par tous ces morts, tandis que d’autres se tournent vers l’hédonisme et les plaisirs orgiaques pour les mêmes raisons. L’équilibre régional des forces est bouleversé, les nations cherchant davantage à accroître leur influence et leurs territoires. Tout cela, c’est la toile de fond du Livre 4.

Y aura-t-il d’autres volumes dans la série ?

Je l’espère, même s’ils ne seront peut-être pas écrits par moi. Dans l’immédiat, malheureusement, il n’y a pas de projet pour un Livre 5. Il y a trois ou quatre auteurs que j’ai l’intention de contacter pour écrire des suites éventuelles.

Propos recueillis par Patrick de Jacquelot

* Le feuilleton Musketeers a été diffusé par la BBC à partir de 2014. Il comprend trois saisons de dix épisodes chacune.

** Les fans de Musketeers écrivent de nombreux textes qui en sont dérivés.

 

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