If tomorrow comes
Sidney Sheldon
506 pages 1985 - États-Unis Roman
Intérêt: **
Ce «thriller» de grande consommation est directement
inspiré du Comte de Monte-Cristo, du moins dans sa première
moitié. Mais un comte de Monte-Cristo dont la personnalité est
largement inversée...
L'Edmond Dantès de Sheldon est en effet une jeune femme. Tracy
Whitney est ravissante, réussit fort bien dans son métier
de banquière à Philadelphie, et est fiancée à l'héritier
d'une des plus vieilles familles de la ville. Mais peu avant son mariage,
sa vie bascule avec le suicide de sa mère qui, veuve, dirigeait
l'entreprise familiale à la Nouvelle-Orléans. Tracy apprend
que sa mère a été victime de la mafia locale:
elle a cru faire une bonne affaire en vendant son entreprise pour un prix élevé,
mais a en fait été l'objet d'une escroquerie. Dépouillée
de tout et criblée de dettes, elle a préféré le
suicide.
Désireuse de se venger, Tracy se rend chez l'homme d'affaires qui
a roulé sa mère: il tente de la violer et, dans la
bagarre qui s'ensuit, elle le blesse. Du coup, il la fait arrêter
pour tentative de meurtre et l'accuse de lui avoir volé un tableau
de grand prix (cette fausse accusation lui permet de dissimuler une escroquerie à l'assurance).
L'avocat de Tracy lui affirme qu'il a passé un accord avec le juge
local: si elle plaide coupable, elle n'aura qu'une peine avec sursis
et sera libérée. Lui faisant confiance, elle accepte. Bien
mal lui en prend: l'avocat et le juge sont, comme l'homme d'affaires, à la
solde du parrain de la Nouvelle-Orléans: elle se retrouve
condamnée à quinze ans de prison...
Son arrivée au pénitencier est une descente aux enfers:
violences sexuelles, promiscuité, rien n'est épargné à cette
jeune fille de bonne famille. La violence même de cette expérience
lui permet cependant de découvrir en elle des forces cachées.
Elle s'adapte tant bien que mal, trouve une chef de gang protectrice. Chargée
par le directeur de la prison de s'occuper de sa petite fille, Tracy sauve
la vie de cette dernière qui était en train de se noyer.
Ce qui lui vaut d'être graciée après quelques mois
de séjour au pénitencier.
Une fois sortie, Tracy entreprend de se venger. Son séjour en prison
lui a appris toutes sortes de techniques criminelles et lui a donné des
relations. Elle utilise tout cela pour tendre des pièges à ses
persécuteurs. Grâce à sa connaissance des procédures
bancaires, elle fait virer sur le compte de l'homme d'affaires qui a dépouillé sa
mère de nombreuses sommes d'argent et le fait savoir au parrain
de la mafia. Persuadé que son adjoint travaille pour son propre
compte, il le fait assassiner. Elle discrédite de même l'avocat
vendu, fait passer le juge pour un espion, etc...
Sa vengeance accomplie, Tracy aspire à retrouver une vie normale.
Elle n'a plus ni famille, ni fiancé, ni le moindre argent. Mais
elle réalise vite que sa réinsertion ne va pas de soi:
son casier judiciaire la fait rejeter de partout. Au point qu'elle finit
par accepter de mener à bien des cambriolages pour le compte de
bijoutiers qui la renseignent sur leurs clients, leurs collections et leurs
moyens de protection.
Acceptées au départ à contre-coeur, pour ne pas mourir
de faim, ces missions finissent par enthousiasmer Tracy, qui se découvre
des trésors de sang-froid et d'ingéniosité.
Dès lors, elle devient cambrioleuse et escroc de haut vol, multipliant
dans le monde entier les exploits de plus en plus spectaculaires, jusqu'au
vol d'un Goya en plein Musée du Prado, à Madrid... Traquée
par toutes les polices du monde, Tracy, qui maîtrise à la
perfection l'art de changer d'identité, leur échappe systématiquement
et se retire, fortune faite. Tout au long de sa carrière criminelle,
elle aura cependant toujours choisi ses victimes parmi les riches corrompus
et malhonnêtes, se comportant en une sorte de Robin des Bois moderne
et se vengeant ainsi de la société qui l'a rejetée.
Si la deuxième moitié du livre s'en éloigne considérablement,
la première découle directement du Comte de Monte-Cristo.
Avec quelques sérieuses variations: il n'y a pas d'abbé Faria
pour Tracy, ni de trésor. Les épreuves lui font découvrir
les ressources qu'elle porte en elle, et si elle se trouve finalement très
riche, c'est grâce à son «travail» et à son
ingéniosité.
Par rapport au héros de Dumas, le principal intérêt
du livre tient au retournement infligé à celui-ci:
Edmond Dantès au féminin, prouvant sa toute puissance dans
le crime - fût-ce sans violence et sans méchanceté.
Ecrit pour une lecture rapide, le livre est bien éloigné de
la grande littérature mais est plaisant. La succession des escroqueries
de plus en plus ingénieuses, dans la deuxième moitié,
est en particulier fort amusante.
Signalons par ailleurs sur Sheldon s’est inspiré de Monte-Cristo
dans d’autres livres. C’est le cas de la première partie
de Master of the game, qui raconte l’histoire d’un
jeune Ecossais, Jamie McGregor, parti en Afrique du Sud à la fin
du 19ème siècle pour chercher des diamants. Quand il tombe
sur un filon exceptionnel, il se fait escroquer par un potentat local et
quasiment tuer par ses hommes de main. Il monte alors toute une opération
pour voler une quantité considérable de diamants à son
ennemi. Devenu richissime et méconnaissable à cause des épreuves
subies, il se venge de ce dernier en séduisant et déshonorant
sa fille et en l’acculant à la ruine. Le suite du roman raconte
l’histoire de la dynastie industrielle créée par Jamie.
Extrait de la première partie, chapitre 3 She
was not permitted to make any phone calls before she was returned to the
courtroom. Ed Topper stood on one side of her, and Perry Pope on the other.
Seated on the bench was a distinguished-looking man in his fifties, with
a smooth, unlined face and thick, styled hair.
Judge Henry Lawrence said to Tracy, 'The court has been informed that
the defendant wishes to change her plea from not guilty to guilty. Is that
correct?'
'Yes, Your Honour.'
'Are all parties in agreement?'
Perry Pope nodded. 'Yes, Your Honour.'
'The state agrees, Your Honour,' the district attorney said.
Judge Lawrence sat there in silence for a long moment. Then he leaned
forward and looked into Tracy's eyes. 'One of the reasons this great country
of ours is in such pitiful shape is that the streets are crawling with
vermin who think they can get away with anything. People who laugh at the
law. Some judicial systems in this country coddle criminals. Well, in Louisiana,
we don't believe in that. When, during the commission of felony, someone
tries to kill in cold blood, we believe that that person should be properly
punished.'
Tracy began to feel the first stirrings of panic. She turned to look at
Perry Pope. His eyes were fixed on the judge.
'The defendant has admitted that she attempted to murder one of the outstanding
citizens of this community - a man noted for his philanthropy and good
works. The defendant shot him while in the act of stealing an art object
worth half a million dollars.' His voice grew harsher. 'Well, this court
is going to see to it that you don't get to enjoy that money - not for
the next fifteen years, because for the next fifteen years you're going
to be incarcerated in the Southern Louisiana Penitentiary for Women.'
Tracy felt the courtroom begin to spin. Some horrible joke was being played.
The judge was an actor typecast for the part, but he was reading the wrong
lines. He was not supposed to say any of those things. She turned to explain
that to Perry Pope, but his eyes were averted. He was juggling papers in
his briefcase, and for the first time, Tracy noticed that his fingernails
were bitten to the quick. Judge Lawrence had risen and was gathering up
his notes. Tracy stood there, numb, unable to comprehend what was happening
to her.
A bailiff stepped to Tracy's side and took her arm. 'Come along,' he said.
'No,' Tracy cried. 'No, please!' She locked up at the judge. 'There's
been a terrible mistake, Your Honour. I -'
And as she felt the bailiff's grip tighten on her arm, Tracy realised
there had been no mistake. She had been tricked They were going to destroy
her.
Just as they had destroyed her mother. |