Les Mousquetaires de Terniog 2
Jimmy Guieu
224 pages Editions Vauvenargues - 1999 - France SF, Fantasy - Roman
Intérêt: 0
Ce volume porte le N°127 dans la collection «Science-Fiction
Jimmy Guieu»... C'est dire qu'il s'agit là de littérature
industrielle destinée à la plus grande consommation. 
L'histoire s'inscrit dans la série des «Aventures de
Blade et Baker», deux hommes d'affaires aventuriers qui sillonnent
le cosmos pour développer leurs opérations commerciales tout
en luttant contre des extra-terrestres mal intentionnés.
La planète Terniog 2 sur laquelle se déroule ce récit
est un monde plus ou moins médiéval, cadre qui permet à l'auteur
de livrer un pastiche ouvertement proclamé des Trois Mousquetaires.
Les éléments du récit directement repris du livre
de Dumas sont nombreux. A leur arrivée sur la planète, les
hommes de Blade et Baker tombent, dans une auberge, sur un jeune homme
rendu ridicule par sa monture jaunâtre, qui répond - le jeune
homme - au nom de Dâ'hargnand. Ce dernier
rêve d'intégrer les gardes du jeune roi et de sa mère.
Mais quand il s'en approche pour la première fois, il se retrouve
avec des duels avec trois des gardes, qui deviendront ensuite ses meilleurs
amis. Les gardes sont commandés par le capitaine Tê'rivill
(l'idée que Guieu se fait de noms extraterrestres semble être
d'ajouter des apostrophes au milieu des mots et plein d'accents circonflexes).
Le roi et sa mère entretiennent les plus mauvaises relations avec
leur Premier ministre, l'archonte (un titre religieux) Bâ'sniâm.
Celui-ci a prise sur la Reine car elle a fauté avec un extraterrestre.
L'archonte emploie un homme de main balafré et une redoutable tueuse,
fidèles échos de Rochefort et Milady. Etc, etc...
Le roman s'inscrivant dans le contexte d'une longue série de science-fiction,
l'intrigue est évidemment très différente de celle
des Trois Mousquetaires. Il y est question des complots de l'archonte
pour s'emparer du pouvoir suprême, de rivalités entre le pays
où se passe l'action principale et une Nouvelle Terre, continent
lointain évoquant l'Amérique des premiers colons.
En fait, l'intrigue part dans différentes directions. Puis, vingt
pages avant la fin, les événements se précipitent
et des tombereaux d'explications sont assenées, qui tentent, tant
bien que mal, de recoller les morceaux de l'histoire dont le dénouement
n'a ni queue ni tête.
Il y a quelques trouvailles dans le jeu sur les éléments
dumasiens comme, par exemple, quand il apparaît que le jeune héros
Dâ'hargnand est le fils caché de la reine et de son amant - ce
qui revient à faire de d'Artagnan le fils d'Anne d'Autriche et de
Buckingham. Le livre n'en est pas moins consternant.
On serait tenté de remarquer, finalement, que, par rapport à Dumas,
le roman évoque surtout l'aboutissement lointain et complètement
dégénéré d'un système d'écriture
lancé par l'auteur des Trois Mousquetaires. Si le livre
est signé Jimmy Guieu, il a été écrit «en
collaboration avec Frank Walhart, sur une idée de Richard Wolfram».
Mais les trois co-auteurs n'ont le talent ni de Dumas, ni de Maquet. Et
cette littérature de grande consommation ne garde rien des qualités
de son lointain modèle.
Extrait du chapitre 1
Devant le porche d'entrée de La Joyeuse Bombance, s'empressait
un groupe de badauds bruissant de commentaires émaillés de
rires gouailleurs. Attirés par la rumeur, Andy Sherwood et Xhyvor
se dirigèrent vers le lieu du tumulte et, se frayant un chemin parmi
les gobe-mouches, ils purent enfin voir la cause de cette agitation.
Au milieu de la foule goguenarde se tenait un jeune homme d'environ dix-huit
ans revêtu d'un pourpoint de laine à la couleur lie-de-vin.
Son visage, aux pommettes saillantes, était long et brun; ses muscles
maxillaires bizarrement développés lui conféraient
une expression énergique et déterminée. Xhyvor remarqua
que l'inconnu portait un couvre-chef plat et rose surmonté d'une
plume noire sous lequel s'allumaient deux yeux vifs et pétillants
d'intelligence. Le jeune homme portait une longue épée qui,
pendue à un baudrier de peau, battait le poil hérissé de
sa monture.
Tout ce remue-ménage ne provenait pas de l'apparence du cavalier
mais de celle de la monture sur laquelle il était juché.
Il s'agissait d'un animal pansu, au mufle de bélier, d'un âge
canonique, à la robe jaunâtre, curieusement dépourvu
de crins, aux pattes courtes et cagneuses et dont la tête dodelinait
sans cesse dans un étrange mouvement de balancier. Tel quel, il
ressemblait plus à une grosse outre prête à éclater
qu'à une monture digne de ce nom. Du «haut» de son
perchoir, son maître examinait le tohu-bohu qu'il provoquait avec
agacement. Sans mot dire, il finit par mettre pied à terre, voulut
remettre les rênes à un palefrenier mais ce dernier éclata
de rire et, lui tournant le dos, il se dirigea vers les écuries
toutes proches, tout en continuant à se taper les côtes bruyamment.
- Par la barbichette de mon père! jura le jeune homme. Qu'avez-vous
donc à dire sur mon destrier?
I1 s'adressait à la foule qui l'entourait mais comme personne ne
répondait, il mit soudain la main à son épée.
Ce seul geste fit taire instantanément les commentaires moqueurs.
Les badauds s'écartèrent vivement, laissant Andy Sherwood
et Xhyvor seuls face à l'inconnu. Ce dernier les jaugea. I1 ne s'attarda
pas sur le N'Gharien mais posa ses yeux au bleu intense sur la haute silhouette
du baroudeur. Un sourire vaniteux ourla ses lèvres surmontées
d'une fine moustache. Tirant cette fois l'épée de son fourreau,
il déclara d'un ton dédaigneux:
- Tiens donc! Voilà deux quidams plus courageux que les autres...
Ou peut-être plus inconscients, c'est selon. Sachez, messieurs, que
je n'aime pas beaucoup que l'on se moque ainsi de ma monture. Ce cheval
est un fidèle serviteur et qui se gausse de son aspect m'insulte
par la même occasion!
I1 s'interrompit pour juger de l'effet de ses paroles. Déçu
de l'absence de réaction d'Andy qui le dévisageait avec insistance,
il haussa la voix et fusilla son adversaire.
- Je m'estime outragé par votre regard, monsieur Je vous en demande
raison. Sachez cependant que celui qui battra Dâ'hargnand en duel
n'est pas encore né. Vous pouvez me faire des excuses sur-le-champ.
Je les accepterai peut-être...
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