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Le fils des Trois Mousquetaires (roman dialogué)
Ce nouveau volume consacré aux exploits décidément inépuisables du héros préféré de Cami, le fils des Trois Mousquetaires, prend la forme de ces récits dialogués que l’auteur affectionnait tout particulièrement. Mais alors qu’il avait l’habitude de produire de nombreuses saynètes dialoguées d’une dizaine de pages environ, il étend cette fois l’exercice à la longueur d’un petit roman. Cami intègre également dans cette œuvre la courte saynète dialoguée publiée en 1912 ou en 1928, dont il fait le prologue de cette nouvelle œuvre. Cette version du Fils des Trois Mousquetaires se distingue des autres par le fait que le volume inclut un deuxième texte, lui aussi tiré d’Alexandre Dumas, La petite dame de Monsoreau, et que l’intitulé complet du titre du volume est généralement indiqué comme Le fils des Trois Mousquetaires suivi de La petite dame de Monsoreau. Passé le prologue qui peut être lu intégralement ici, les différentes chapitrs du roman suivent tous le même schéma. Le fils des Trois Mousquetaires et sa fiancée, la douce Yolande, accompagnés de leur valet-musclé, fuient de pays en pays. Le souverain du pays où ils arrivent tombe instantanément amoureux de la jeune fille et veut lui « ravir son honneur ». Le fils des Trois Mousquetaires s’y opposent et doit affronter les troupes du souverain en des combats de plus en plus fous. La douce Yolande s’exclame « nous sommes perdus ! », le jeune héros répond « pas encore ! J’ai une idée ! » et sauve la jeune fille, et surtout son honneur, par des moyens parfaitement surréalistes. Les deux tourtereaux affrontent ainsi successivement Louis XIV, le roi d’Espagne, le doge de Venise, le roi de Prusse, le tsar, le grand Mogol, un radjah indien, etc. Comme toujours chez Cami, le tout vaut par son humour totalement délirant.
Extrait du chapitre Le secret du Radjah LE VALET-MUSCLÉ. — Bref, après avoir fixé pendant deux heures son nombril placé sur un pliant en face de lui, le fakir s'est endormi et m'a annoncé que la douce Yolande courait les plus grands dangers dans le harem du « Radjah aux étreintes mortelles ». LE FILS DES TROIS MOUSQUETAIRES. — « Le Radjah aux étreintes mortelles » ? LE VALET-MUSCLÉ. — Oui. Le vieux fakir m'a expliqué qu'on l'appelait ainsi à cause d'une étrange fatalité qui pèse sur lui. Il paraît que toute femme qui subit l'amoureuse étreinte du radjah meurt subitement. C'est un terrible secret. Mais, grâce au fakir, je connais le mystère terrifiant qui coûta déjà la vie à tant de pauvres femmes. C'est un secret monstrueux que l'on n'ose pas répéter à haute voix. Écoutez, Monsieur. (Il parle bas à l'oreille du Fils des Trois Mousquetaires.) LE FILS DES TROIS MOUSQUETAIRES, pâle comme un mort. — Oh! l'affreuse et monstrueuse chose! Je sais à présent pourquoi l'étreinte du radjah ne pardonne pas ! Ma douce Yolande court un double danger : le déshonneur et la mort ! Que faire pour la délivrer et la soustraire à la fatale étreinte ? LE VALET-MUSCLÉ. — Oh ! Monsieur, dans cette situation désespérée, ne trouverez-vous point une de ces merveilleuses idées dont vous avez le secret ? LE FILS DES TROIS MOUSQUETAIRES, les veines du front tendues à se rompre dans un effort d'esprit surhumain. — Je cherche ! Je cherche ! (Hurlant brusquement.) Oh ! j'ai trouvé ! Yolande sera sauvée ! J'ai une idée ! ! ! DEUXIÈME ACTE - LE MONSTRE LA DOUCE YOLANDE. — Prisonnière dans ce sinistre harem, mon pauvre honneur aura-t-il à subir un nouvel et périlleux assaut ? LE RADJAH AUX ÉTREINTES MORTELLES, entrant et parlant hindou. — Par Brahma ! mes eunuques fidèles ont bien fait de capturer cette belle étrangère ! La merveilleuse créature tremble d'effroi. Que serait-ce si elle connaissait l'épouvantable secret de ma naissance ? Le secret de l'étreinte fatale ! LA DOUCE YOLANDE. — Je ne comprends pas son langage. Mais je devine, à sa mimique lubrique, que mon honneur est en péril. Il est impossible que mon cher fiancé puisse me délivrer. Appelons-le quand même, pour la forme. (Criant.) Au secours ! A moi, cher Fils des Trois Mousquetaires ! Oh ! mais que veut dire cela ? Une étrange musique se fait entendre derrière les murs de cette chambre. On dirait le sifflement monotone des charmeurs de serpents. LE RADJAH AUX ÉTREINTES MORTELLES, verdissant. — Oh ! rage ! Mon secret est dévoilé ! La maudite musique m'empêche d'enlacer la belle étrangère ! Oh! rage ! (Il sort furieux.) LE FILS DES TROIS MOUSQUETAIRES, surgissant déguisé en charmeur de serpents. — Sauvée, ma douce Yolande ! Viens, fuyons ! Grâce à mon flageolet de charmeur, j'ai réussi à te soustraire à l'étreinte mortelle du radjah ! LA DOUCE YOLANDE, tout en fuyant. — Que veux-tu dire ? LE FILS DES TROIS MOUSQUETAIRES. — Je dis que j'ai réussi à connaître le secret du « Radjah aux étreintes mortelles ». Ce terrible secret, le voici : pendant sa grossesse, la mère du radjah fatal rencontra un jour sur son chemin un horrible serpent : un hideux aspic ! A la vue de ce serpent, la malheureuse s'évanouit de terreur. Tu n'ignores pas, chère Yolande, les conséquences désastreuses qui peuvent résulter d'une frayeur ou d'une envie lorsqu'une femme se trouve dans cet état intéressant ? Bref, la pauvre femme eut une telle frayeur qu'elle donna le jour à un petit monstre. LA DOUCE YOLANDE. — Un petit monstre ? LE FILS DES TROIS MOUSQUETAIRES. — Oui. Le radjah vint au monde avec... (Il continue la phrase à l'oreille de la douce Yolande.) LA DOUCE YOLANDE, rougissant pudiquement... — Quoi ?... en forme d'aspic ? LE FILS DES TROIS MOUSQUETAIRES. — Oui. En apprenant cet horrible secret, je compris pourquoi l'étreinte du radjah était mortelle, et une merveilleuse idée germa aussitôt dans mon esprit. Déguisé en charmeur de serpents et muni d'un flageolet, je réussis à pénétrer dans le palais du radjah. LA DOUCE YOLANDE, rougissant de nouveau. — Oh ! mon héros ! Je comprends maintenant pourquoi l'air des charmeurs de serpents que tu jouais sur ton flageolet a engourdi et endormi, tel un véritable aspic, l'ardeur lubrique du « Radjah aux étreintes mortelles » ! RIDEAU.
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