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Athos & Milady In the Beginning

Jennifer M. Fulford

314 pages
Black Bomb Books - 2015 - États-Unis
Roman

Intérêt: *

 


Complètement fascinée, semble-t-il, par le personnage d’Athos, l’Américaine Jennifer Fulford lui a consacré pas moins de trois romans. Le premier et le troisième (dans l’ordre de publication), Blood, love and steel et The last duel, imaginent la vie d’Athos juste après la fin des Trois mousquetaires de Dumas. A l’inverse, le deuxième, Athos & Milady In the Beginning, est consacré, comme l’indique le titre, aux débuts des relations entre Athos et Milady.

Le résultat est un peu déconcertant. On retrouve certes les grands traits de la rencontre entre le comte de la Fère et Anne de Breuil: cette dernière arrive aux côtés de son frère curé dans la paroisse du seigneur, elle intrigue pour le séduire, se fait épouser. La découverte accidentelle de la fleur de lys infamante qui la marque amène son mari à la tuer (ou du moins à essayer), puis à changer complètement de vie en devenant mousquetaire.

Si les grandes lignes sont bien là, l’histoire racontée par Jennifer M. Fulford diverge en revanche de façon importante avec celle imaginée par Dumas. Essayons de résumer. Athos (il se fait déjà appeler ainsi bien avant d’en faire un pseudonyme dans le corps des mousquetaires) est un très grand seigneur: suite au décès de son père, il vient de devenir « souverain » (sic, « sovereign ») du Berry, un titre qui, sans en faire l’équivalent d’un roi, lui donne, semble-t-il, à peu près tous les pouvoirs dans la région. Il peut imposer sa volonté à tout le monde, y compris à l’église. Il a un ami inséparable, du nom de Bronte, avec qui il court les filles. Quand Bronte lui présente une jeune femme exceptionnelle, Anne de Breuil, il est aussitôt subjugué.

Il faut dire que celle-ci est suprêmement belle, intelligente et cultivée. Mais ce n’est pas tout: elle déploie également des séductions tout à fait explicites. Elle est portée sur le sexe et ne s’en cache pas. Athos la surprend dans l’église de son frère, enfermée dans un confessionnal, en train de se masturber bruyamment (sic). Invité à un « pique-nique », Athos la trouve en compagnie de deux autres jeunes filles de la haute société en train de se baigner nues dans un lac parfaitement public et de se caresser (voir extrait ci-dessous). Et les jeunes filles ne se pressent pas de se vêtir à son arrivée.

De nombreuses scènes érotiques se succèdent ainsi, Anne aguichant de plus en plus intensément Athos (pot de miel à l’appui…) sans jamais conclure. Jusqu’à ce que le malheureux succombe, on le comprend, et cela en dépit des mises en garde de son entourage. Que l’attraction d’Athos pour la future Milady soit essentiellement physique est d’autant plus évident qu’il est profondément amoureux d’une autre jeune femme, Demi, fiancée à Bronte (cette double attraction, physique d’une part, sentimentale d’autre part, peut faire penser aux relations de d’Artagnan avec Milady et Constance dans Les trois mousquetaires). Un amour qu’il refuse de s’avouer, sauf quand il est trop tard. Et comme Bronte a par ailleurs couché avec Anne de Breuil, on mesure à quel point les relations entre ces quatre-là sont emberlificotées…

Quasiment aucune scène d’action (sauf érotique) dans cette histoire qui est essentiellement un roman psychologique centré sur la fascination sexuelle exercée par Anne sur le malheureux Athos. Anne manifeste certes ses penchants diaboliques avec quelques empoisonnements (sa rivale Demi entre autres), mais cela n’apparaît qu’en toile de fond.

Comme les deux autres romans de Jennifer Fulford, celui-ci souffre par ailleurs de nombreuses absurdités. L’essentiel de l’action se passe à Blois que l’auteure semble donc placer dans le Berry. Et un personnage donne rendez-vous à un autre pour le lendemain matin quelque part en Alsace. Ce qui démontre une certaine légèreté dans les recherches géographiques. Blois dispose d’une cathédrale mais est parfois décrit comme un village. Athos habite le château de Vallière, c’est-à-dire celui de la fiancée de son fils Raoul dans Le vicomte de Bragelonne. L’une des dernières scènes voit Athos forcer le prêtre local (pas le frère d’Anne, un autre) à un duel en pleine église!

Bien écrit, plutôt bien mené, le roman n’est pourtant pas mauvais en soi, même si l’on peut trouver que le comportement des personnages évoque plus le XXIème siècle que le XVIIème: imagine-t-on trois jeunes filles de l’aristocratie de l’époque se baigner nues à la vue du premier passant venu? Le plus gênant tient cependant aux divergences factuelles avec ce que l’on sait d’Athos et de Milady chez Dumas. Le rôle essentiel joué dans Athos & Milady In the Beginning par Bronte et Demi transforme profondément les circonstances de la passion d’Athos pour Anne telles qu’on les voit dans Les trois mousquetaires. La position sociale d’Athos n’est pas du tout la même dans les deux romans. Menant une vie solitaire de quasi reclus chez Dumas, il est ici un seigneur de tout premier plan, « souverain », avec de multiples obligations. Des détails très concrets sont également modifiés. La fleur de lys qui marque Milady n’est plus positionnée sur son épaule mais sur son bras, où elle est dissimulée sous un bandeau noir. Un changement curieux qui s’explique sans doute par le fait que cela permet à l'auteure de la faire se baigner entièrement nue, avec juste ce bandeau, ce qui serait impossible s’il lui fallait cacher son épaule.
 
Autre transformation du récit de Dumas: quand Athos découvre la fleur de lys, il ne pend pas Anne. Il l’attache derrière un cheval qu’il lance au galop. Elle est traînée par terre et disparaît, un procédé de mise à mort extrêmement cruel et en même temps complètement incertain. Le cheval et le corps ne sont pas retrouvés mais elle est considérée comme forcément morte, alors qu’il n’en est rien, bien sûr.

Au bout du compte, c’est finalement à une sorte d’« histoire parallèle » qu’on a le sentiment d’assister, celle d’un Athos et d’une Milady inspirés par Dumas, bien sûr, mais qui ne se raccordent pas vraiment aux Trois mousquetaires contrairement au but affiché par l’auteure.


Extrait du chapitre 5 Coincidences

Moving closer to the bank, Athos aimed for a thicket of tall bushes, beyond which the voices and splashes grew louder. Out of sight, he could hear Anne, Genue and Margot playing in the water - more specifically, shrieking in good humour. The sky was bright white, and the sounds of the merriment bounced off the water in shrill tones.

As Athos pushed aside the thick greenery, the light flashing off the water blinded him. All he could do was squint. He blinked several times, until his sight was dazzled by more scorching images. The women lolled about in the water as naked as nymphs. Their skin radiated like sprays of Queen Anne's lace.

He immediately crouched down, broke his gaze, and took several gulps of air. He clutched his throat and felt his pulse race ahead of him. If he backtracked for Demi, he might interrupt Bronte's proposal - or apology - but Athos didn't feel like running. Instead of blatantly watch, he closed his eyes and listened.

He recognised Anne's voice right away. "Do you suppose she'll come back?"

"Don't worry about my cousin," Margot said. The water splashed. "She may never join us, but maybe seeing us will loosen her up."

Anne laughed. "Bronte thought so. She has a lot to learn if she's never been with anyone before. He might be a little disappointed."

Margot giggled. "Don't blame her, Anne. She's saving herself."

Anne affected a thick French accent. "My tongue, Madame, would eagerly express; Lord, I cannot look less than loathingly."

Athos recognised the line from the du Bellay poem in an instant. He squeezed his eyes tighter.

"I don't understand any of that poetry you spout off. What's the point? A lover wants only one thing from your tongue," Genue said.

"Words are the most powerful tool you have," Anne answered. "Not only can they arouse the flesh, you can also use them to seduce your lover's mind. It's more important than any curve you possess because a poem can win a man's soul."

"Oh, you think you know so much." Margot sounded condescending. "A kiss is a kiss, is a kiss, is a kiss. There's nothing that'll make it more than it is."

"Come here, and I'll teach you, if you're brave enough."

Athos heard shallow splashes near the bank toward Anne's voice. He broke into a profuse sweat, battling his scruples. Wasn't it every boy's dream to secretly watch a naked woman without her knowing? His entire life, the opportunity to peep had never arisen. Now three women? Their conversation alone was sinful, and the stakes had just been raised. How would he explain this to Father Turre? Praying for forgiveness, he crossed himself and opened his eyes.

Standing in the lake up to mid-calf, the three women could have been statues of ivory painted pink in all the right places - their lips, their nipples, and yes, the quaint cherubs between their legs.

Anne was the most relaxed with herself. In charge. Her beauty surpassed the others. Her breasts were plump and firm, and the hair between her legs was a sandy tulle. Her body was a prime thoroughbred, taut and muscular in a satiny way. As Margot approached her, Anne's breaths came more rapidly, causing droplets beneath her bosom to glide past her belly button.

Athos would have given away his finest swords and horses to taste the water trickling down her skin.

As soon as Margot stood near, Anne began to trace the outline of Margot's breast. Margot shied at first but relaxed when Anne shushed her. She said nothing else but continued to make passes around Margot's breast until the nipple was tight with excitement. For her next act, Anne laid a cheek on Margot's collarbone.

"Now Margot, a lover's touch is exciting, as I've demonstrated. But if I speak my heart while I enjoy your body, you'll find there's a difference." Anne continued to tickle Margot's breast while reciting. "Drink with me, play with me, love with me, be wreathed with me; be wild when I am wild; and when I am still, be still."

Margot shuddered as Anne kissed her cleavage and ran a hand up the small of her back. It came to rest just in time to catch Margot.

In exquisite pain, Athos curled up and moaned as low as he could. His heart rumbled and body rang. He felt dangerously out of control. The good and bad of what he had just seen sullied his moral base. Anne was an angel and a demon. Eternal dark and first light.


 

 

 

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