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La fille de Chicot (Les Quarante-Cinq)

Charles Vayre

254 pages
1937 - France
Roman

Intérêt: **

 

Ce livre a été réédité en 1952, dans une version réduite de moitié (128 pages). Le texte d’origine a été coupé à la hache, sans même un effort de condensation, au point d’en être parfois complètement dénaturé (voir deuxième couverture, plus bas).

Ce roman prend la suite de la trilogie des Valois de Dumas (La reine Margot, La dame de Monsoreau, Les Quarante-Cinq) et enchaîne directement sur ce dernier roman.

On y retrouve le roi Henri III, toujours menacé par les complots de la famille de Guise, et protégé par ses Quarante-Cinq (même s’ils ne sont que brièvement mentionnés). Surtout, on continue à suivre les aventures de Chicot, authentique gentilhomme, fou du roi et principal soutien de celui-ci.

La trame historique enchaîne également sur Les Quarante-Cinq: on assiste dans ce roman à l’assassinat du duc de Guise, puis à celui d’Henri III. Chicot continue, comme chez Dumas, à faire l’intermédiaire entre le Roi et Henri de Navarre, futur Henri IV.

Principale innovation du roman: Chicot y est doté d’une fille cachée, Louise. Celle-ci tombe amoureuse du chevalier de Guise, frère bâtard du duc et ennemi juré de Chicot. Le chevalier l’enlève et la déshonore, amenant Chicot à la poursuivre de sa vengeance. Le livre se termine par la mort de Louise, puis celle de Chicot.

Bien mené, le roman constitue une fidèle imitation de ceux de Dumas, honnêtement réalisée, qui se laisse lire agréablement. Dommage que la fin soit un peu bâclée. On peut préférer La fin de Chicot, du Paul Mahalin, qui couvre à peu près la même période et prend également la suite des Quarante-Cinq, ou encore La Belle Gabrielle d'Auguste Maquet qui se situe quelques années plus tard.


Extrait du chapitre 13 Margot au bain

Quelques minutes après, (Chicot) arrivait au Palais des Mariannes, le magnifique hôtel dont Marguerite de Navarre avait fait sa résidence.

Un laquais s'empara du cheval de Chicot, un autre conduisit Chicot à un chambellan qui, effaré d'abord, s'inclina ensuite respectueusement lorsque Chicot, impérieux, lui eut déclaré:

- Il faut que je voie Sa Majesté tout de suite. Je lui suis envoyé par Sa Majesté le roi de France.

Il le fit entrer dans 1'intérieur du Palais.

Il se rappela soudain qu'il ignorait le nom de cet ambassadeur extraordinaire.

- Qui dois-je annoncer à Sa Majesté? demanda-t-il courbé jusqu'à terre.

- Le fou du roi! répondit simplement Chicot.

- Le... le... bégaya le chambellan.

- Chicot! si vous préférez.

La bouche ouverte, les yeux écarquillés, le gros chambellan contempla la haute silhouette de Chicot, ne sachant trop s'il était bien éveillé, s il avait bien entendu.

Chicot aimablement lui dit doucement:

- Je suis sur le point d'attendre, mon ami.

- Oui... oui... monsieur Chicot... bafouilla le pauvre homme, mais... mais je crois que Sa Majesté est dans le pavillon des Bains.

- Qu'à cela ne tienne, j'irai jusqu'à la piscine. Conduisez-moi.

Le chambellan, assommé, les idées en désarroi, ne sachant plus ce qu'il faisait, se dirigea d'un pas rapide à travers les couloirs vers la sortie du palais qui aboutissait dans les jardins au fond desquels se trouvait le fameux pavillon.

Chicot allongea ses grandes jambes, se maintenant constamment à la hauteur du malheureux qui finit par courir.

Chicot était toujours à ses côtés.

Le chambellan pénétra dans le pavillon, essoufflé, se heurta à deux caméristes qui jacassaient dans le vestibule.

- Une visite pour Sa Majesté... de la part de Sa Majesté...

Chicot salua gracieusement les deux aimables personnes qui le dévisageaient curieusement.

- Mon ami, dit-il au chambellan, vous pouvez vous retirer... Je n'ai plus besoin de vous.

Le chambellan ne se fit pas répéter l'invitation et toujours affolé, se sauva du pavillon.

- Dites à la reine, dit Chicot, que je viens de Paris et que je désire lui parler de la part de son frère.
“ Ou plutôt non, dites simplement mon nom: Chicot.

I1 parlait avec une telle autorité qu'une des deux servantes alla tout de suite prévenir la reine.

Elle revint un instant après, le visage souriant:

- Veuillez me suivre, monsieur Chicot.

Elle le conduisait dans la vaste salle où Margot avait l'habitude tous les matins de prendre son bain.

Dans une très grande piscine qu'entouraient des colonnes de porphyre, la reine Marguerite de Navarre nageait voluptueusement dans l'eau tiède et parfumée où se délassait son corps parfait, véritable modèle pour un statuaire.

Aucun voile ne masquait ses formes charmantes. Elle était nue comme la main.

- Bonjour, ami Chicot, cria-t-elle gaiement au fou. Soyez le bienvenu à notre Cour.

Sur le bord de la piscine, Chicot, abandonné par la femme de chambre, se confondait en salutations.

Margot lui dit en fendant l'eau gracieusement pour se rapprocher de lui:

- Je ne vous donne pas ma main à baiser, parce qu'il me faudrait sortir de l'eau et que je suis toute nue.
“ Dans la piscine, l'eau me vêt.
“ Ne trouvez-vous pas, Chicot ?

- Cette onde cristalline est le vêtement idéal! répliqua sérieusement Chicot.

- Vous venez de Paris, paraît-il, en droite ligne.

- Oui Majesté.

- Vous avez à me parler de la part de mon frère.

- Oui Majesté.

- Ma mère connaît-elle le but de votre visite?

- Non Majesté... Votre auguste frère a tenu à ce que la reine mère ignore ma démarche.

- Alors je crois deviner dans quel but... Que vous a dit mon mari?

- Le roi de Navarre! Mais je ne l'ai pas encore vu! mentit effrontément Chicot.

- Vous en êtes certain?

- Autant qu'on peut être certain de quelque chose ici-bas...

- Que vous a-t-il dit?

- Si Votre Majesté, insinua Chicot, voulait bien me faire l'honneur de supposer que je n'ai pas vu le roi de Navarre, cela faciliterait beaucoup l'entretien que je désire avoir avec elle.


 

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